Le chiffre a de quoi donner le tournis : le Premier ministre britannique, Gordon Brown, hôte du G20 de Londres, a annoncé que 5.000 milliards de dollars seraient déversés sur l’économie mondiale d’ici la fin de l’année 2010. Des millions de millions sont déversés mois après mois dans le trou noir de la finance mondiale et pour l’heure rien ne change !
Un trou noir.
A ce flot sans précédent de billets verts s’ajoute l’effort consenti pour muscler le FMI et la Banque mondiale. Au total, le montant de leurs tiroirs-caisses seront portés à 1.000 milliards de dollars, dont 750 pour le FMI, soit un effort supplémentaire de 500 milliards, ce qui triplera ses moyens. Le FMI qui est aussi prié par le G20 d’avancer les ventes de son stock d’or pour venir en aide aux pays les plus pauvres.
Mais les chefs d’Etat n’ont pas voulu signer un chèque en blanc au monde des affaires.
Sur le dossier très sensible des paradis fiscaux, Gordon Brown a annoncé la publication d’une liste. “Il faut en finir avec le secret bancaire du passé”, a martelé le chef du gouvernement britannique. Et cette liste noire sera publiée dès aujourd’hui, selon le souhait de la France et de l’Allemagne, qui ont poussé les feux sur la question. La Suisse est enfin fichée sur une liste internationale pour ses pratiques bancaires occultes.
Malgré toutes ces injections massives de liquidités le bateau ivre de l’économie mondiale prend eau de toutes parts en commençant par le bateau amiral US.
Les destructions d’emplois US deviennent massives.597.000 en novembre, 577.000 en décembre, 600 000 en janvier, 651 000 en février, 742 000 en mars…
Le tissu économique se déchire, la situation déjà difficile des constructeurs automobiles, emblème de l’industrie américaine, s’aggrave encore. General Motors et Ford ont annoncé, mercredi 1er avril, des chiffres de ventes en chute libre de près de la moitié pour le mois de mars. Le gouvernement américain envisage de conduire GM à une faillite « sous contrôle », en persuadant certains de ses créditeurs d’approuver un plan qui scinderait le groupe en deux.
American International Group va être liquidé « de manière ordonnée« par le Trésor américain. L’assureur, longtemps numéro 1 par son chiffre d’affaire, a accumulé les pertes les plus importantes jamais enregistrées par une entreprise américaine. Le secrétaire au trésor Tim Geithner, a dévoilé un plan visant à débarrasser les banques de leurs actifs douteux, un plan pouvant s’élever jusqu’à 1.000 milliards de dollars.
Les fonds de retraite américains sont en pleine déconfiture. Un trou de 1000 milliards de dollars, des Etats qui n’assurent plus, et des faillites qui s’annoncent…
Situation catastrophique généralisée, en décembre, le Center for Retirement Research de l’Université de Boston a évalué à 2 900 milliards de dollars le passif de ces fonds, contre un actif de moins de… 2 000 milliards. Comble du cynisme, les fonds de retraite affichent des résultats comptables corrects, en vertu de normes comptables peu regardantes. Les trous mirobolants pourront ainsi n’apparaître que dans quelques années.
Conséquence directe : les émissions d’obligations de pension sont de plus en plus fréquentes. Il faut bien boucher les trous… mais cette solution de facilité est éminemment dangereuse, et ça commence à se voir : les obligations sont fourguées à des taux élevées, de l’ordre de 8%, quand les rendements des placements des fonds de pension ne dépassent pas les 3%. Généralement, les placements sont constitués à 60% en actions, 30% dans des titres à revenu fixe, 5% dans l’immobilier et le reste dans des investissements très risqués, tels que les hedge funds et les produits dérivés. Une gestion de bon père de famille… déjanté.
Certains Etats y perdront deux fois, ayant participé aux émissions d’obligations des fonds qui ne seront bientôt plus en mesure de rembourser, et devant ensuite renflouer les pertes. « Nous sommes très près de la faillite (…) Le budget est hors de contrôle, le Trésor est en triste état », explique l’économiste José Villamil, à propos de l’Etat de Porto Rico qui subit les errements de son régime de retraites publiques. En vertu de la loi, les États doivent garantir les dettes des fonds de pension public, mais ils se dégagent au maximum. Le contribuable paiera les dégâts et les retraités seront indemnisés, mais à des taux très inférieurs à ce qu’ils miroitaient.